HB9CEM / AE7AL / VE3PSX

Simulation Electronique pour le Radioamateur

1 Simulateurs basés sur SPICE

1.1 Berkeley SPICE

SPICE (Simulation Program with Integrated Circuit Emphasis) est un programme de simulation temporelle (avec possibilités de simulations fréquentielles) écrit par l'Université californienne de Berkeley, mis dans le domaine public, et par conséquent gratuit.

SPICE requiert un netlist comme fichier d'entrée, et fournit des courbes sous forme d'un fichier ASCII. Il ne contient par conséquent aucun moyen sophistiqué d'entrée des données ou d'affichage des résultats. C'est cependant le simulateur le plus utilisé, car il sert de « coeur » a plusieurs ensembles commerciaux, certains très chers, pour la simulation dans le domaine temporel.

1.2 Orcad PSPICE, LTspice et autres Spice

Orcad PSPICE et LTspice sont deux de ces ensembles commerciaux, dont le principal attrait est de fournir un éditeur graphique pour l'entrée des schéma, un netlister pour la traduction du schéma, et surtout une interface de sortie appelée probe qui permet d'afficher les tensions et courants dans le circuit sous formes de très beau graphiques.

Pour ces deux simulateurs, comme pour d'autres, il existe une version de démonstration, gratuite, qui contient presque tous les avantages de la version commerciale. Quelquefois, le circuit est limité a un faible nombre d'éléments dans un même schéma. Dans d'autres cas, en particulier LTspice, il ne semble pas qu'il y ait de limitations. Ceci permet de simuler des circuits très intéressants, en particulier pour le radioamateur.

Plusieurs versions de SPICE sont donc disponibles sur le web, entre autres LTspice (gratuit) sur le site de Linear Technology qui permet l'entrée directe de schémas sans passer par un netlist manuel. Voici donc en guise d'exemple, la simulation d'un circuit préamplificateur à un transistor.

Commençcons par créer un netlist manuellement, pour une première simulation, puis nous referons le même exercice, mais en utilisant l'éditeur de schéma de LTSpice.

1.3 Circuit d'adaptation d'impédance

a) Description du circuit

En guise d'exemple simple d'utilisation du simulateur SPICE, voici la simulation d'un circuit d'adaptation d'impédance, permettant de connecter un microphone céramique haute impédance sur une entrée basse impédance prévue pour un microphone dynamique.

Normalement un microphone céramique a une impédance de l'ordre de 50 kΩ, et fournit un signal d'une amplitude jusqu'à 0,5 V (eff). Un microphone dynamique a une impédance de 200 Ω et donne un signal ne dépassant pas 100 mV (eff).

Non-seulement notre circuit devra effectuer une adaptation d'impédance, mais on désire aussi qu'il atténue le signal au niveau normal pour un microphone dynamique, soit d'un rapport de 5:1.

Le schéma ci-dessous reproduit le circuit proposé pour notre étage. Le microphone est représenté par une source alternative de 0,5 V eff, soit 0,7 V peak (Vin), en série avec une résistance de 50 kohms (R1). Pour la simulation nous choisirons une fréquence de 1 kHz, soit approximativement au milieu de la gamme qui nous intéresse, soit 300 à 3000 Hz. En un second temps, nous effectuerons une analyse en fréquence permettant de visualiser la réponse en fréquence de notre circuit.

Nous choisirons un montage à polarisation automatique, vu la faible puissance requise du circuit et le fait que ce montage doit être aussi simple que possible, étant probablement prévu pour être monté à l'intérieur du boîtier du microphone céramique.

Le transistor choisi est l'un des modèles le plus courant, soit un 2N2222, équivalent à un BC237. Sont gain (beta) est de l'ordre de 200. Ceci a son importance car le système de polarisation automatique dépend dans une bonne mesure du courant de base pour son fonctionnement.

La résistance R2 fournit le courant de polarisation à la base du transistor. Le montage étant un collecteur commun (émetteur follower), le collecteur est connecté directement à la ligne d'alimentation positive. La division par 5 de la tension de sortie se fera en partie par un diviseur dans le circuit d'émetteur. En effet les 0,5 V aux bornes du microphone ne sont disponibles que dans une impédance infinie. Ici l'impédance d'entrée est de l'ordre de 70 kohms, comme nous le verrons plus bas. La tension sur la base du transistor n'est alors plus que de :

0,5 · 70 / (50 + 70) = 0,3 V

La résistance de sortie sera de l'ordre de 200 Ω. Cette résistance est normalement l'impédance d'entrée de l'étage suivant. Ici une résistance de 200 Ω (R5) symbolise cette charge. La résistance de sortie de notre montage sera aussi approximativement de 200 Ω. La résistance développant la tension de sortie est choisie de 560 Ω (R4), dans le but de laisser passer la composante DC du courant d'émetteur. La valeur de cette résistance est choisie pour qu'elle donne, en combinaison avec R3, une impédance de sortie voisine de 200 Ω (théorème de Thévenin).

En charge, R3 verra les 200 Ω de la charge en parallèle avec R4, soit (en négligeant l'impédance de C2) une valeur de 147 Ω. Pour obtenir la division par 3 encore requise, il faut choisir R3 de 2 fois cette valeur, (3 - 1) soit 270 Ω en valeur normalisée.

Tout ce calcul est approximatif et passablement simplifié, mais les résultats de la simulation nous permettront de nous assurer du fonctionnement du circuit et d'y apporter des modifications éventuelles.

Pour obtenir une tension de 100 mV (efficace) en sortie, soit 141 mV pk, le courant dans une résistance de 200 Ω doit être au moins de 0,7 mA (141E-3 / 200). Choisissons cependant 1,5 mA afin de pouvoir obtenir une amplitude suffisante sans distortion lors des crêtes de tension.

Ceci impose une tension de 1,4 V (approx.) sur l'émetteur, et donc 2 V sur la base. Comme la tension d'alimentation est choisie à 6 V, la résistance de base doit être de :

R = U / I = (6 - 2)/(1,5E-3 / 200) = 533 kΩ

soit 470 kΩ en valeur normalisée. 560 kΩ est plus proche, mais on préfère un peu plus de courant plutôt que moins pour plus de marge (headroom) en sortie.

Pour le calcul des capacités de liaison, utilisons la fréquence la plus basse à transmettre, soit 300 Hz et considérons que la capacité doit présenter une impédance de 1/10 de celle du circuit dans lequel elle agit.

Circuit d'entrée : l'impédance d'entrée du transistor est élevée, soit la résistance de base (470 kΩ) en parallèle avec l'impédance dans la base (ici RE · beta = ((560 // 200) + 270) · 200 = 83,5 kΩ), pour une résultante de ~70 kΩ. A ceci il faut ajouter la résistance interne du microphone de 50 kΩ. Le circuit présente donc une résistance totale de 120 kΩ. 1/10 de ceci donne 12 kΩ, et le condensateur qui présente cette impédance à 300 Hz vaut approximativement 47 nF.

Note : le facteur de 1/10 est généralement utilisé pour des circuits nécessitant une bonne réponse en fréquence, dans le cas de la transmission au moyen d'un émetteur, une réponse en fréquence aussi « bonne » aux fréquences basses n'est cependant pas désirable, choisissons donc un condensateur de 22 nF. La simulation fréquentielle effectuée plus bas nous permettra de vérifier que même cette valeur est encore plus que suffisante.

Note : La notation // ci-dessus représente la mise en parallèle des résistances de 560 et 270 Ω.

Dans le circuit de sortie, l'impédance est de l'ordre de 400 Ω (200 Ω de la source et 200 Ω de la charge), et le condensateur adéquat est ici de 6,8 µF.

Ces calculs effectués, il ne nous reste plus qu'à créer le netlist et procéder à la simulation du circuit pour vérifier son fonctionnement.

Tous les noeuds du circuit sont numérotés afin de procéder à la création du netlist. Le chiffre 0 est réservé à la masse. Ici 2 est l'entrée du circuit et 7 la sortie.

Schema du pre-ampli

b) Netlist

Voici un listing du netlist adéquat pout LTspice :

Adaptation d'impédance pour microphone céramique

* Ceci est le 'modèle' pour le transistor (voir  page 
* précédente pour une explication sur les modèles)

.MODEL 2N2222  NPN (IS=2.20f NF=1.00 BF=240 VAF=114
+ IKF=0.293 ISE=2.73p NE=2.00 BR=4.00 NR=1.00
+ VAR=24.0 IKR=0.600 RE=0.194 RB=0.777 RC=77.7m
+ XTB=1.5 CJE=24.9p VJE=1.10 MJE=0.500 CJC=12.4p VJC=0.300
+ MJC=0.300 TF=371p TR=64.0n EG=1.12 )

* Ceci est le 'netlist' proprement dit

R1 1 2 50k      ; résistance interne du micro
C1 2 3 22n      ; Cond. de liaison d'entrée
R2 4 3 470k     ; Polarisation de base
R3 5 6 270      ; Résistance d'émetteur du haut
R4 6 0 560      ; Résistance d'émetteur du bas
C2 6 7 6.8u     ; Condensateur de liaison de sortie
R5 7 0 200      ; La résistance de charge de sortie
Q1 4 3 5 2N2222  ; Le transistor, dans l'ordre C B E

V1 4 0 6V       ; Alimentation de 6V

* Ceci est le générateur d'entrée, sinusoide 
* de 1 kHz, 0,5 V eff representant le microphone.

Vin 1 0 AC 0.707 SIN 0 0.707 1000 0 0

* Ceci sont des lignes de controle

.probe
*.op
*.tran 1e-5 3e-3
*.ac dec 100 10 3000

.END
Note : les 3 analyses que nous allons faire sont une analyse du point de fonctionnement du transistor, controllée ici par la ligne .op, une analyse temporelle .tran 1e-5 3e-3 et une analyse fréquentielle .ac dec 100 10 3000. Pour le moment, ces 3 lignes sont précédées du signe * ce qui en fait des lignes de commentaire et sont donc ignorées par le programme. Nous allons supprimer l'astérisque d'une ligne à la fois pour chaque analyse que nous allons effectuer.

c) Point de fonctionnement

Supprimons l'astérisque devant la ligne .op et lançons la simulation. Nous obtenons le tableau ci-dessous qui représente les tensions et courants dans le circuit.


       --- Operating Point ---

V(1):	 0	 	 voltage
V(2):	 2.16727e-015	 voltage
V(3):	 1.97024	 voltage
V(4):	 6		 voltage
V(5):	 1.26493	 voltage
V(6):	 0.853445	 voltage
V(7):	 1.16069e-015	 voltage
Ic(Q1):	 0.00151544	 device_current
Ib(Q1):	 8.57395e-006	 device_current
Ie(Q1):	 -0.00152401	 device_current
I(C2):	 5.80343e-018	 device_current
I(C1):	 -4.33453e-020	 device_current
I(R5):	 5.80343e-018	 device_current
I(R4):	 0.00152401	 device_current
I(R3):	 0.00152401	 device_current
I(R2):	 8.57395e-006	 device_current
I(R1):	 -4.33453e-020	 device_current
I(Vin):	 4.33453e-020	 device_current
I(V1):	 -0.00152401	 device_current

On remarque que :
- Sur la première ligne, on voit que v(1), soit la tension sur le noeud 1 est de 0 volt, ce qui correspond à la tension DC du microphone, qui bien entendu est nulle.
- Puis, le courant Ic vaut 1,51 mA, ce qui correspond à nos attentes.
- Le courant de base (Ib) est de 8,57 µA.
- Le gain en courant du transistor (beta) vaut Ic/Ib =  ~177, juste un peu moins de notre estimation de 200.
- Les lignes pour V(2) et V(7), qui devraient être zéro, et qui en sont proche (très petits nombres, donc négligeables).
- Les lignes pour I(C2), I(C1), I(R5), I(R1) et I(Vin)qui devraient être zéro, et qui en sont proche (très petits nombres, donc négligeables).

d) Simulation temporelle

Passons maintenant à une simulation temporelle en enlevant l'astérique devant la ligne .tran 1e-5 3e-3. Ici, 3e-3 signifie que nous voulons simuler le circuit pour les premiers 3 ms, en sauvant le résultat tous les 1e-5 s, soit tous les 10 µs. Une fois la simulation terminée, on peut obtenir une courbe des signaux d'entrée et de sortie sur lesquelles nous pouvons ajouter des curseur pour en mesurer l'amplitude exacte.

simulation temporelle

Nous pouvons aussi obtenir des courbes pour tous les autres noeuds du circuit si nécessaire, ainsi que les différents courants.

Nous pouvons vérifier que la tension développée par le microphone à l'entrée du circuit est effectivement de 435 mV pk (curseur 1), soit quasiment 300 mV eff (division par 1,414), ce qui correspond à la valeur calculée ci-dessus.

La tension de sortie est de 139 mV pk (curseur 2), soit 98 mV eff (division par 1,414), ce qui correspond aux 100 mV désirés.

e) Simulation fréquentielle

Reponse en frequence

Le curseur 1 est placé à 1 kHz qui est notre fréquence de référence. Le curseur 2 est placé à -3 dB (0,707 fois la tension à 1 kHz). Nous constatons que la fréquence à -3 db est de ~100 Hz, ce qui est trop bon pour nous. On peut aisément accepter une réponse de -3 dB à 300 Hz. On peut pour cela diminuer la valeur des deux condensateurs de liaison, et en particulier celui de sortie qui peut passer à 1 µF. Nous obtenons alors la réponse ci-dessous qui est entièrement acceptable pour un circuit destiné à la transmission de la parole (réponse de -3 dB à ~300 Hz par rapport à 1 kHz).

Reponse en frequence

1.4 Entrée du schéma au moyen de l'éditeur de LTspice

Il existe de nombreux tutoriaux sur le web pour l'utilisation de LTspice. Nous nous contenterons ici de présenter le schéma fini et de faire tourner les mêmes simulations que ci-dessus.

Schema du pre-ampli

Faisons d'abord tourner une simulation temporelle comme ci-dessus.

simulation temporelle

Les résultats sont identiques. Les quelques petites différences s'expliquent par le fait que le modèle n'est pas exactement le même.

Faisons tourner maintenant une simulation temporelle (avec un condensateur de 6,8µF en sortie).

simulation temporelle

Le résultat est absolument identique.

1.5 Conclusion

Toutes les caractéristiques du circuit pourraient être vérifiées et ajustées au moyen de simulations puis, le circuit construit, ce dernier devrait fonctionner correctement du premier coup.

Cette simulation simple a permis de mettre en évidence quelques-unes des possibilités de SPICE, en particulier dans la version de LTspice. Des résultats similaires peuvent être atteints au moyen d'autres versions de SPICE. Rappelons que la différence essentielle entre les différentes moutures de SPICE réside généralement dans les interfaces de pré et post-processing (entrée du schéma et affichage des résultats).


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